pénurie actuelle de semi-conducteurs

Après avoir affronté la pandémie de Covid-19, le monde fait maintenant face à la guerre en Ukraine. Ce nouvel événement majeur impacte le monde industriel en affectant les capacités de production par un manque criant de matières premières. Il est maintenant question d’une pénurie de composants, notamment de semi-conducteurs. Ces puces électroniques, que l’on retrouve dans tous les appareils de notre quotidien, font défaut au point d’entraîner des retards de livraison très importants, déstabilisant ainsi les résultats économiques des fabricants. Quelles sont les causes de la pénurie actuelle de semi-conducteurs à l’échelle mondiale ? Un retour à la normale est-il possible ? Explications sur un phénomène qui affole les marchés. 

Un réel décalage entre une demande en hausse et une offre réduite

Certaines puces ont été produites en surabondance, quand d’autres n’atteignent pas le niveau requis pour assurer la demande. Par exemple, quelques puces de jeux vidéo débordent des stocks alors que des semi-conducteurs pour l’automobile manquent cruellement. La crise sanitaire a fermé les frontières et sérieusement freiné les échanges internationaux, mais les usines qui en ont eu la possibilité ont continué à produire pour finir par être contraintes de stocker, faute de pouvoir expédier. 

Dès la fin de la crise épidémique, l’approvisionnement en composants électroniques a repris, mais sans parvenir à rattraper le retard occasionné par toutes les contraintes sanitaires et réglementaires.

La demande est en hausse, notamment du fait des industries automobiles, très gourmandes en semi-conducteurs. Mais tous les secteurs sont concernés, car tous consomment des puces électroniques. Qu’il s’agisse de téléphones portables, de robots ménagers ou de n’importe quel appareil contenant de l’électronique, tous les fabricants attendent d’être réapprovisionnés. Un nouveau problème a fait surface : si auparavant, la pénurie de semi-conducteurs touchait les chaînes de production dans la constitution du produit fini, elle concerne maintenant l’outil de production lui-même. 

Aujourd’hui, ce sont les fabricants des machines prévues pour la conception de ces puces qui n’assurent plus les demandes. Le géant américain Intel envisage d’ouvrir de nouvelles usines, mais celles-ci ne pourraient pas être équipées comme prévu. Cela contraint Intel à revoir totalement son activité fonderie. Les délais annoncés par les leaders en matière de conception de machines pour fabriquer les puces sont désormais portés à 18 mois d’attente, dans le meilleur des cas.

Une situation économique instable et un contexte géopolitique tendu expliquent la pénurie actuelle de semi-conducteurs

Si la crise de la Covid a initié cette pénurie de composants, les difficultés d’approvisionnement en semi-conducteurs proviennent essentiellement d’un contexte géopolitique compliqué. La grande majorité des puces électroniques sont produites en Asie et aux États-Unis, la part de l’Europe ne représentant que 7 %. Les pays asiatiques appliquent la politique « zéro Covid », ils ont donc subi les fermetures d’usines ainsi que les restrictions de personnel. Maintenant, ils affrontent le manque de conteneurs pour expédier leurs marchandises, puis font face à des coûts de transports plus élevés qui se répercutent sur le produit final.

La guerre en Ukraine a fini de rebattre encore les cartes, en compliquant considérablement les circuits d’approvisionnement, du fait de nouvelles contraintes imposées, soit par la communauté internationale, soit par la Russie. D’un côté, la Russie interdit tous les transporteurs étrangers sur son sol ou son espace aérien, et d’un autre côté les assureurs des transporteurs européens refusent d’assurer les voyages sur les territoires en guerre. Les relations commerciales sont ainsi soit très tendues, soit prohibées.

En ce qui concerne plus précisément la pénurie de semi-conducteurs, il faut savoir que l’Ukraine et la Russie comptent tous deux parmi les principaux fournisseurs de gaz krypton utilisé pour la fabrication des puces électroniques. Le problème concerne également la fourniture de gaz néon qui sert à la gravure du silicium par des machines laser. L’Ukraine à elle seule fournit plus de 50 % de ce gaz sur le marché mondial.

Une pénurie qui touche directement le secteur automobile

Le secteur de l’automobile est certainement le plus impacté par la pénurie de semi-conducteurs. Les constructeurs européens utilisent pour la plupart des puces d’ancienne génération, très demandées. Ces composants sont nécessaires à l’électrification des aides à la conduite et de certains organes de sécurité. Si le marché des semi-conducteurs peine à fournir les constructeurs, c’est finalement le consommateur qui est pénalisé, car les chaînes de production ne peuvent plus sortir de véhicules neufs. 

Les concessionnaires perdent ainsi tout un segment d’acheteurs contraints finalement de se tourner vers le marché de l’occasion, s’ils ne peuvent pas attendre le véhicule à l’état neuf.

Des constructeurs comme Tesla réussissent à tirer leur épingle du jeu, car ils utilisent des puces de dernière génération, qui ne rencontrent quasiment aucune pénurie actuellement. Non seulement ils vendent des véhicules neufs, mais ils répondent parfaitement à la tendance actuelle en demande croissante de véhicules électriques.

Si un retour à la normale est attendu pour 2024, les constructeurs recherchent des solutions pour pallier immédiatement les conséquences de la pénurie de semi-conducteurs pour le marché automobile. Un sourcing des fournisseurs au plus près des terminaux de production ou le fait d’adapter les modèles futurs selon les produits facilement accessibles dès la conception sont les solutions privilégiées en attendant des mises en œuvre plus pérennes.

L’Europe a compris qu’elle devait réinvestir dans son autonomie, à tous les niveaux d’approvisionnement. De nouvelles usines vont voir le jour chez les membres de l’UE, dans l’objectif de multiplier par 4 leurs capacités de production de semi-conducteurs d’ici 2030.